FORUM "La chasse en campagne " - 20 février 2007

Les présidentiables à la tribune de la chasse

Qui peut se permettre de réunir, à deux mois de cette échéance capitale pour notre pays qu’est l’élection présidentielle, le même jour à la même tribune, les principaux candidats parmi lesquels, à coup sûr, le ou la futur(e) Président(e) de la République ? La Fédération nationale des chasseurs l’a fait, illustrant ainsi de façon éclatante que la chasse, au-delà d’un loisir et d’un art de vivre, est l’une des composantes économiques et dynamiques du monde rural, objet de tous les enjeux électoraux.

« L’électeur chasseur est une proie difficile à capter ; en cas de réussite, elle est difficile à garder a prévenu le Président de Ponchalon. C’est un électeur dont les choix sont plus dictés par une qualité de vie dans le monde rural que par une idéologie. »

Une fois n’est pas coutume, les chasseurs se sont donc fait gibier, pour mieux tenter les redoutables chasseurs de voix que sont les candidats à l’élection présidentielle. Voici le résumé des efforts déployés par les candidats, dans leur ordre de passage à la tribune.

Nicolas Dupont Aignan : sortir l’écologie de la « vertitude »

Nicolas Dupont Aignan, candidat de « Debout la République » a noté que s’il était important de réconcilier la France avec ses banlieues, il ne fallait pas pour autant oublier les campagnes.

« Le monde rural ne doit pas faire l’objet d’une mise en réserve mais d’une gestion dynamique. Sans chasse, pas de vie dans nos campagnes. »

Objectif : Réconcilier la chasse avec l’écologie, l’Europe et réorganiser le monde rural

Ses engagements :
- Développer les territoires ruraux en s’appuyant sur la chasse - Toujours préférer la concertation avec les élus locaux
- Sortir du centralisme européen

Eléments de programme :
- Assurer le développement rural et réviser les règles agricoles
- La société doit prendre conscience de la place que la chasse occupe dans la protection de l’Environnement.
- Dénoncer l’absurdité de l’hégémonie européenne : l’Europe doit rendre à la France la maîtrise de la chasse
- Maintenir les services publics (notamment la Poste) en zone rurale
- Maintenir les possibilités de logement en zone rurale pour les familles qui y vivent
- Veiller à préserver les prérogatives des communes : l’intercommunalité ne doit pas devenir une prison


Charles de Courson, porte-parole de François Bayrou : nous vous aimons !

Fervent défenseur de la chasse dans l’hémicycle, chasseur lui-même en Champagne, le Député Charles-Amédée de Courson représentait François Bayrou, candidat de l’UDF. Il a plaidé pour le dynamisme et un respect accru des campagnes, et pour plus de bon sens dans la gestion des affaires de la chasse. En homme du sérail, il est entré dans le détail de ce que les chasseurs font et de ce qu’ils devraient faire, en insistant sur les liens ruraux de François Bayrou.

Objectif : Refus du centralisme européen ; utilisation de l’Europe à bon escient

Ses engagements :
- Mettre la chasse sous cotutelle Ecologie / Agriculture

Eléments de programme :
- Plus de bon sens dans la gestion de la chasse, en appliquant les règles à l’échelon régional, sous l’autorité des préfets
- Solutionner le problème des dates de chasse par :
o La subsidiarité
o Reconnaissance du guide interprétatif de la Directive
o Le développement des études scientifiques
o La déconcentration au niveau des départements



Ségolène Royal : merci de votre présence en milieu rural et de vos actions ; je vous souhaite du bonheur !

La candidate socialiste a un passé chasse, de par sa famille et son passage au Ministère de l’Ecologie. Elle a salué les efforts des chasseurs pour affronter les évolutions et s’adapter et rappelé son engagement personnel aux côtés de la Fédération des chasseurs de son département.

« La chasse est une conquête du peuple français et j’entends que ce droit reste démocratique et populaire. »

Objectif : faire le bilan de ce qui existe, évaluer les politiques mises en place avant tout nouvelle décision

Ses engagements :
- Conserver le cadre législatif actuel car « nous sommes arrivés à une situation équilibrée »
- Faire obstacle aux ministres de son Gouvernement qui voudraient attacher leur nom à une nouvelle loi…
- Garantir la pérennité du droit de chasse

Eléments de programme :
- Dépassionner le débat entre l’Etat, les chasseurs et les institutions
- Plus de modération dans les prises de position des uns et des autres
- Renforcer le dialogue avec les chasseurs dans le cadre de la gestion de l’espace rural
- En fonction des évaluations, peut-être rattacher la chasse au Ministère de l’Agriculture
- Migrateurs :
o définir les conditions de l’évaluation scientifique
o jouer la transparence en rendant publiques les données de l’observatoire : « tout doit sortir de la confidentialité »
- Laisser les chasseurs tranquilles ; apprendre aux urbains à connaître et à respecter leur passion



Frédéric Nihous : La ruralité, tout le monde en parle mais quand il s’agit de retrousser ses manches, il n’y a plus personne !

Comme il l’a souligné, le candidat de « Chasse pêche nature traditions » était dans sa famille puisqu’il est chasseur passionné. Il a fait remarquer qu’en 2003, lorsque les députés européens déposèrent un projet de modification de la Directive 79-409, tous les partis politiques enterrèrent cette modification, ce qui est en contradiction avec leurs promesses actuelles. Sa campagne s’appuie sur la chasse mais aussi sur tout ce qui touche la vie en milieu rural.

Objectif : battre les Verts !!!

Ses engagements :
- Militer pour une écologie d’équilibre, respectant l’homme et ses activités ; une écologie incitative et non répressive
- Rétablir l’équilibre en faveur du monde rural (services publics, commerces, etc.)
- Créer un ministère des affaires rurales

Eléments de programme :
- Récupérer ce que l’on nous a volé depuis des années et anticiper pour protéger ce que l’on veut nous prendre
- Recréer la solidarité parmi les chasseurs pour peser dans tous les débats politiques, à l’instar des écologistes.



Philippe de Villiers : Les chasseurs de mon département ont planté 5 millions d’arbres !


Philippe de Villiers, candidat du Mouvement pour la France, a surpris la salle, par son discours et surtout par son aisance et son humour. A l’applaudimètre, il est sans doute le gagnant de la journée. Il a d’abord salué le beau tableau de chasse du Président de Ponchalon pour ce forum, avant de se présenter comme un rural profond. Selon lui, le chasseur est avant tout le protecteur des arbres, le gestionnaire des espaces naturels sensibles et de la faune, et le pédagogue de l’Environnement.

« Le monde de la chasse, qui m’a beaucoup appris, porte un loisir utile, une activité économique et une culture. »

Objectif : Rendre vie à la ruralité car « elle est une chance pour la France »

Ses engagements :
- Instaurer la subsidiarité pour les dates de chasse et régionaliser
- Créer un Ministère de la ruralité dont dépendra la chasse
- Faire une pause législative et consulter les chasseurs en amont
- Intégrer la police de l’environnement à la gendarmerie et la faire financer par l’Etat
- Donner à l’ONCFS un rôle d’expertise scientifique

Eléments de programme :
- Rétablir la place des communes face à l’intercommunalité galopante où ce n’est plus l’élu qui commande mais l’administration
- Rétablir le service public dans la ruralité : « réintroduire des postiers catalans plutôt que des ours slovènes »
- Enraciner les PME dans le monde rural : « plutôt l’artisanat que l’assistanat »
- Rapatrier les libertés perdues dans nos campagnes
- Mettre à plat les directives européennes



Dominique Voynet : méfiez-vous, les candidats sont parfois (re)nommés ministre !

En préambule, Dominique Voynet, candidate des Verts, déclara « qu’elle n’était pas venue faire la danse du ventre » (on n’en demandait pas tant), ni régler les comptes du passé… ce qu’elle fit tout au long de son intervention. Elle revint notamment sur les pétards mouillés qu’elle ne parvint pas à faire sauter durant son passage au ministère (Cour des comptes…). Manifestement, la candidate en mal de points dans les sondages était venue « faire un coup médiatique » (parfaitement réussi). Cependant, en endossant sa panoplie de « casseuse de chasseurs », elle n’a pas rendu service au (à la) futur(e) Président(e) de la République qui serait susceptible de l’accueillir au sein de son gouvernement, dont les chasseurs se défieront forcément. En résumé, une intervention sensationnelle, pas du tout constructive mais assurément destructrice.

« Je regrette que les chasseurs fassent si peu pour la conservation de la nature. »

Ses griefs envers la chasse :
- L’acte de prélèvement est de moins en moins naturel (lâchers)
- Les chasseurs ne sont pas des régulateurs efficaces de la faune (proliférations des sangliers, cervidés, étourneaux…)
- Les élections fédérales dans les fédérations ne sont pas démocratiques
- Les chasseurs ne s’investissent pas suffisamment dans la protection des sites, zones humides notamment (!)

Ses engagements et son programme :
- A part le maintien de la chasse dans le ministère de l’Ecologie, ces thèmes n’ont pas été développés mais ils trouvent leur résumé dans la menace sans équivoque lancée en conclusion : « Méfiez-vous ! ». Sous-entendu : je redeviendrai peut-être votre ministre de tutelle. Au moins, les choses sont claires.




Gérard Le Cam, porte-parole de Marie-Georges Buffet et Maxime Grémetz, représentant du groupe Communiste : aujourd’hui, la mort d’un animal émeut plus que celle d’un humain !

En l’absence de la candidate communiste, c’est Gérard Le Cam qui a parlé en son nom. Auparavant, Maxime Gremetz s’est exprimé quelques minutes au nom du groupe communiste, avec la verve qu’on lui connaît, notamment en relevant que « dans tous les pays européens où la chasse est élitiste, elle est en voie de disparition » et que le système associatif et fédéral de la chasse française est un modèle. Quant à Gérard Le Cam, il a adressé beaucoup de louanges au monde de la chasse.

« L’acte de chasse est légitime, et s’il n’existait pas, je n’ose imaginer les conséquences pour l’Etat. »

Objectif : Assurer une chasse populaire et démocratique

Ses engagements :
- Créer un secrétariat d’Etat à la chasse, à la pêche en eaux douces et aux activités non appropriatives de la nature
- Garantir la pérennité du droit de chasse

Eléments de programme :
- Désamorcer la menace que fait peser l’arrivée du bien-être animal, en sensibilisant à la valeur de la vie humaine, dévoyée par la violence cinématographique.
- Gérer la chasse au niveau local et non à celui de l’Europe
- Adapter la réglementation agricole aux règles de respect de l’environnement et de la faune, alors qu’actuellement l’agriculture respectueuse est sanctionnée par Bruxelles.



Jean-Marie Le Pen : vous êtes les derniers méharistes de la nature !

Jean-Marie Le Pen, candidat du Front national, a remercié le Président de Ponchalon de l’avoir invité à cette tribune, alors qu’il est généralement exclu de tels évènements. Il a fait le rapprochement entre la façon dont il est traité par les médias, et la caricature qui est faite des chasseurs et l’injustice qu’ils subissent. Il a dénoncé les atteintes à la liberté de détenir des armes et dans le registre rural, le désastre écologique des remembrements.

« Vous faites de l’écologie de terrain alors que les professionnels de l’écologie ne font que de l’exceptionnel. Et le véritable protecteur de la nature est accusé d’en être le destructeur. »

Objectif : faire revivre le monde rural dont la chasse fait partie en s’affranchissant des excès de Bruxelles

Ses engagements :
- Créer un plan rural
- Sortir la chasse du Ministère de l’écologie pour l’intégrer dans un Ministère de l’Agriculture et de la Nature, et rétablir un climat de confiance
- Ne plus céder à Bruxelles
- Simplifier les Directives oiseaux et paysages

Eléments de programme :
- Elaguer les réglementations ; tailler dans le « sous-bois législatif »
- Réguler les espèces invasives (cormorans…)
- Créer un fond d’intervention pour la ruralité et d’une dotation rurale d’équité sociale finançant notamment les services aux personnes âgées
- Création d’un Conservatoire du vignoble avec les mêmes moyens que le Conservatoire du littoral
- Instauration d’un chèque de rupture de contrat de préférence communautaire à l’attention des agriculteurs
- Création du « Matin des paysans » pour répondre aux enjeux majeurs de demain, notamment la forte demande alimentaire de Chine et d’Inde, alors que l’Europe actuelle entend laisser ce créneau à l’hémisphère sud en condamnant l’agriculture française à l’échéance 2012.




Nicolas Sarkozy : on peut être un pays moderne et garder ses traditions ; la chasse en est une !

Nicolas Sarkozy, candidat de l’UMP, s’est déclaré heureux de s’adresser à ceux « qui ne brûlent pas de voitures mais qui ont néanmoins besoin d’être respectés ». Il a relevé les avancées obtenues par la chasse sous la Droite républicaine, alors que les débats portant sur la chasse avant 2002 n’ont à ses yeux aucun sens. Tout en insistant sur la nécessité de respecter les règles, notamment pour les espèces protégées, il s’est dit soucieux de résoudre les problèmes des chasseurs, par exemple ceux liés… au petit gibier.

« L’écologie a trop souffert des idéologies. La chasse aussi. Je ne serai pas le président des mesures vexatoires. »

Objectif : Assurer une chasse durable en y associant largement les chasseurs dont le souci est de maintenir le potentiel pour eux et leurs enfants

Ses engagements :
- Déployer une véritable politique écologique de terrain, alors que 60.000 ha ruraux sont urbanisés ou industrialisés chaque année
- Pas de nouvelle législation ; pas de chasse étatique
- Création d’un ministère de la ruralité, auquel la chasse sera rattachée
- Intégrer les études de l’observatoire en demandant aux scientifiques de se mettre d’accord
- Regrouper la police de la chasse – comme toutes les polices – au sein d’un Ministère de la sécurité

Eléments de programme :
- Dépassionner le débat entre l’Etat, les chasseurs et les institutions
- La biodiversité est l’enjeu majeur de l’écologie ; il faut préserver
o la biodiversité d’exception (ultramarine…)
o et la biodiversité ordinaire (celle qui concerne les chasseurs)
- Sensibiliser les citoyens : les atteintes à la nature ne sont pas le fait des agriculteurs et des chasseurs mais de chacun d’entre nous et de nos styles de vie



En résumé…

Tous les candidats, sauf un (Dominque Voynet) ont manifesté leur sympathie à la chasse, la nécessité d’assurer sa pérennité et de décrisper les relations avec une meilleure écoute des chasseurs.

Tous sauf un (le même) ont souligné le rôle positif des chasseurs en matière d’aménagement et de gestion et souligné le rôle positif, voire primordial du système fédéral français.

Tous sauf un (toujours le même) ont exprimé leur souci de l’avenir du monde rural, sa nécessaire mise en valeur, ainsi que l’importance de la chasse dans son fonctionnement et son avenir.

Nicolas Dupont Aignan, le représentant de François Bayrou, Frédéric Nihous, Philippe de Villiers, le représentant de Marie-Georges Buffet et Nicolas Sarkozy ont regretté la main mise de l’écologie politique sur les problèmes d’environnement.

Concernant l’avenir proche, nous avons noté les éléments suivants :

- Ne pas modifier la législation actuelle (Ségolène Royal, Philippe de Villiers, Nicolas Sarkozy) ou l’assouplir (François Bayrou, Frédéric Nihous, Marie-Georges Buffet)

- Illustration du malaise entre la chasse et sa tutelle : seule Dominique Voynet propose que les choses restent en l’état alors que

o François Bayrou propose une cotutelle « Ecologie / Agriculture »;
o Ségolène Royal, le rattachement à l’Agriculture (avec en bémol, en fonction des « évaluations ») ;
o Frédéric Nihous, Philippe de Villiers et Nicolas Sarkozy, la création d’un ministère rural ou de la ruralité (incluant la chasse) ;
o M-G Buffet, un secrétariat d’Etat à la chasse, à la pêche en eaux douces et aux activités non appropriatives de la nature ;
o J-M Le Pen le rattachement à un ministère de l’Agriculture et de la Nature

- Concernant l’ONCFS, Philippe de Villiers s’est engagé à lui donner un rôle d’expertise scientifique, en confiant la police de la chasse aux gendarmeries, alors que Nicolas Sarkozy propose de rattacher la police de la chasse et l’ensemble des polices à un ministère de la Sécurité.

- Concernant les dates de chasse des migrateurs,
o Nicolas Dupont Aignan, François Bayrou, Frédéric Nihous, Philippe de Villiers, Marie-Georges Buffet, Jean-Marie Le Pen proposent de se dédouaner des contraintes européennes pour opter pour la régionalisation.
o Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy ont plaidé pour un développement des études scientifiques, de façon transparente et sans laisser prise aux idéologies (sans doute par opposition à certains rapports passés dits scientifiques qui font autorité aujourd’hui…). Nicolas SARKOZY a souhaité enfin l’intégration du « guide interprétatif » dans la directive Oiseaux, de façon à bénéficier des « décades de chevauchement ».

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